Accueil > Mises à jour
Trouver la place de la religion dans la vie démocratique du Canada
octobre 6, 2020
Une semaine avant que le pays ne mette en place des restrictions importantes en raison du coronavirus, un petit groupe de députés, d’assistants et de représentants nationaux de groupes religieux se sont réunis dans une petite salle de conférence au troisième étage d’un bâtiment parlementaire de la rue Wellington, à Ottawa. L’objectif de la réunion était de discuter de la création d’un caucus interconfessionnel multipartite, une entité qui pourrait faciliter le dialogue entre les parlementaires et les diverses communautés religieuses du Canada sur des sujets d’intérêt et de préoccupation communs : la réconciliation, la pauvreté, la gestion de l’environnement, les discours de haine et d’autres enjeux. Les députés qui ont contribué à diriger cette initiative avec le soutien de la Conversation Interreligieuse Canadienne, parleront du rôle de la foi comme vecteur de dialogue lors du prochain sommet DemocracyXChange.
Lors de la dernière campagne électorale fédérale, la discussion sur la religion a surtout été présentée comme une source de division et de polarisation. Qu’il s’agisse des positions morales du chef conservateur ou du débat sur la loi 21 au Québec, la religion était considérée comme un obstacle à la conversation pour les politiciens. Il est devenu évident que nous avons besoin d’un nouveau langage et de nouveaux concepts pour aborder la religion dans la sphère publique. Nous reconnaissons souvent la religion comme une source d’identité, de pratique spirituelle et d’articles de foi profondément enracinés. Ce sont des sources de différence qui ajoutent à la diversité de notre pays. Elles nous appellent à invoquer la même éthique d’inclusion, de tolérance et d’apprentissage mutuel que celle que nous appliquons aux autres différences sociales.
Mais si les religions du Canada contribuent à notre diversité, elles renforcent aussi notre vie commune de diverses façons. Au niveau individuel, les communautés religieuses contribuent à encourager les jeunes à consacrer leur vie à l’amélioration du monde et au service des autres. La religion renforce également les liens communautaires qui contribuent à la vitalité des quartiers et aux relations de confiance sociale. Ces communautés donnent également naissance à des institutions, allant des organismes de bienfaisance aux petites entreprises, qui génèrent d’importants bénéfices publics. En d’autres termes, les religions du Canada sont un élément important du tissu de la vie démocratique. Peu de gens remettent en question le fait que la religion puisse être antidémocratique, surtout lorsque ses dirigeants encouragent les préjugés, la désinformation et la peur. Notre défi consiste donc à créer des structures qui peuvent renforcer la religion prosociale en reliant les idées issues des enseignements et de l’expérience des communautés religieuses aux processus de délibération démocratique.
Le Caucus interreligieux multipartite se veut un mécanisme pour ce type d’action démocratique. Les groupes multipartites sont des organes parlementaires informels qui sont devenus une caractéristique de plusieurs législatures de type Westminster. Ils rassemblent généralement des parlementaires d’arrière-ban de différents partis pour travailler avec des groupes non gouvernementaux sur des questions d’intérêt commun. Comme l’a fait remarquer M. Paul Thomas, les groupes parlementaires multipartites ont proliféré au Canada au cours des dernières décennies – souvent sous l’impulsion de ces intérêts convergents. Ils offrent aux parlementaires la possibilité de développer des idées politiques grâce à une interaction structurée avec les électeurs, les groupes communautaires et les lobbyistes. Si de nombreux partis ont également des groupes thématiques, les groupes multipartites exercent une influence compensatrice sur la partisanerie croissante en réunissant des parlementaires de tous bords.
Le 15 octobre à 11 heures (heure de l’Est), trois parlementaires de différents partis politiques participeront à une table ronde à DemocracyXChange sur la manière dont la foi peut être un véhicule de dialogue à une époque de polarisation partisane. Elizabeth May (Parti vert), Garnett Genuis (Parti conservateur) et Anthony Housefather (Parti libéral) discuteront de la manière dont la religion peut jouer un rôle positif dans la politique publique et de la meilleure façon de s’engager auprès de citoyens de diverses religions. J’ai travaillé avec le Dr John Milloy, ancien ministre du gouvernement de l’Ontario et directeur du Centre d’éthique publique du Martin Luther University College, pour organiser cette conversation. Nous espérons que la discussion mettra en évidence des concepts et des principes qui transcendent les différences partisanes et favorisent un espace de dialogue public plus solide.
Geoffrey Cameron
Geoffrey Cameron est directeur du Bureau des affaires publiques de la communauté bahá’íe du Canada. Il est également associé de recherche au Laboratoire de migration mondiale de la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l’université de Toronto, et a été auparavant conseiller politique principal à Affaires mondiales Canada. Il est titulaire d’un doctorat en sciences politiques de l’université de Toronto, où il a été boursier de la Fondation Pierre Elliott Trudeau.